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Pour Thomas Pynchon

jeudi 10 novembre 2011, par Xavier Garnerin

Bien que la rue ne fût que lointainement éclairée par un crachotant réverbère – comme si la fée électricité, qui venait à peine de naître, avait trouvé ici l’endroit idoine pour témoigner de son encore fragile constitution – les abords de l’établissement paraissaient rutiler de tous les avatars d’une joie sombre : un frisottis de chuchotements hilares, des paires de regards doucement étonnés et comme suspendus dans l’ombre au-dessus des bornes pompières et des poubelles blottissant dans leurs alentours de jeunes et fringants petits tas d’immondices, des sourires dont la franche énigme ressortissait à l’évidence de la consommation excessivement diverse de tous les psychotropes qu’on pouvait se procurer dans les rues avoisinantes de Mall Mall, desquelles la géométrie fractale constituait ce que les fêtards de Delivery, clignant avec connivence de l’œil gauche tout en haussant le sourcil droit, désignaient du suggestif surnom de PMS (powders méga saloon).

– Vous allez voir, dit Pedgie Penson.

– Ça promet, répondit par-dessus son épaule la haute stature de Krank, surtout si ce qu’on verra est proportionnel à ce que, jusqu’ici, nous nous échinons à ne pas voir.

– Ou finalement ne voyons pas, ajouta Timburn Staatwood tout en lorgnant de façon péremptoire sur la découpe noir sur noir d’un couple enlacé stochastiquement.

À l’intérieur du Woo-Woo-Waouh l’ambiance brumeuse se construisait paisiblement, comptant sur ses placidité et plasticité habituelles, toutes deux conduisant la clientèle du lieu à tirer, avec des bonheurs réels ou relatifs, toutes les ficelles possibles du grand et putatif n’importe quoi. On distinguait au travers de la fumée des cigares ou réputés tels des bourgmestres à gilet et pantalons à sous-pieds rampant sur le dos pour récupérer leur bowling-hat que remplissaient à grands jets roboratifs de jeunes égéries écartant leurs tendres jambes gainées de bas de coton, versant au hasard, derrière leur dos et de la main gauche le contenu d’une bouteille de Pisang Ambon (http://www.pisangambon.com, Please verify your year of birth, 1901, ENTER, Choose your favourite Pisang Ambon mix) tandis que la droite soulevait le pan de devant de leur robe des dimanches, comme pour former l’entrée d’une grotte plaisante et hasardeuse, des ouvriers en bleu de chauffe qui jouaient au pied-de-fer et se colletaient fermement afin d’en établir une bonne fois pour toutes les règles, des solitaires se pêchant mutuellement leur poisson rouge, des joueurs de dominos ronflants, des prosélytes du Grand Destin de la Petite Couronne déjà montés sur les tables et n’entendant aucunement, et sous aucun prétexte, en redescendre avant le petit matin. Sans parler des curieuses combinaisons d’alcools et de sirops que le cosmopolitisme ambiant, déjà passablement éméché, commandait continûment au bar comme pour décliner de cette virtualité la gamme la plus large, Chartreuse und Sekt, côtes-du-rhône cu slivović, maté de bourbon, etc. Whisky-coca et Cuba Libre divers. Jalmes s’en tirait toujours avec un certain brio.

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