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Rêveur, Scapin Gratte un lapin Sous sa capote.
Colombina, — Que l’on pina ! — — Do, mi, — tapote
L’œil du lapin Qui tôt, tapin, Est en ribote...
3 novembre 2011, par Arthur Rimbaud
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X
Bien que la rue ne fût que lointainement éclairée par un crachotant réverbère – comme si la fée électricité, qui venait à peine de naître, avait trouvé ici l’endroit idoine pour témoigner de son encore fragile constitution – les abords de l’établissement paraissaient rutiler de tous les avatars d’une joie sombre : un frisottis de chuchotements hilares, des paires de regards doucement étonnés et comme suspendus dans l’ombre au-dessus des bornes pompières et des poubelles blottissant dans leurs alentours (...)
10 novembre 2011, par Xavier Garnerin
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X
Pilou est mort.
J’écris cette phrase. Et je n’oublie pas le point.
Ça fait dix mois que Pilou est mort. Dix mois maintenant.
Mon mari est agent immobilier. Ma meilleure amie est enceinte : jusqu’aux yeux comme on dit. C’est bête mais on dit ça. Les deux faits n’ont rien à voir ; je veux dire les deux propositions « mon mari est agent immobilier » et « ma meilleure amie est enceinte » n’ont qu’un lien ténu, voire pas de lien du tout.
Je dis n’importe quoi, je ne devrais pas (...)
14 novembre 2011, par Marianne Desroziers
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Le doux refrain Du slow sans fin De l’été Berçait nos corps De ses accords Répétés.
Tout transpirant Et rouge, quand Il s’achève, J’arrive à prendre Tes lèvres tendres C’est le rêve.
Et nous partons Vers ton futon Pour, tout nus, Danser le feu D’un pas de deux Inconnu.
28 novembre 2011, par Magali D.
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La pluie dardée De l’embardée D’hirtémone Givre mes dents D’un cri ardent De crémone.
Tout en pêchant Des fleurs le chant De berceuse, Je sens, salin, Un froid vilain De perceuse.
Mon sang laqué, Je suis traqué, Quand s’amorce, En éclatant, Le feu suintant Des écorces.
8 décembre 2011, par Joachim Séné
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Dehors il pleut. Au-delà du verre grossièrement sablé de la fenêtre circulent, aléatoirement à l’échelle de la minute mais continûment si les heures passent, des octogones de couleur principalement noire (à diverses hauteurs dont la moyenne pourtant approxime un mètre soixante-quinze à partir du sol de la pièce, sol qui, poussée la porte, s’avère d’un niveau quasi identique à celui de l’espace immédiat de la rue ; en effet, seul un petit ressaut, piégeux pour qui n’y accorderait pas une attention et d’à peine (...)
15 décembre 2011, par Xavier Garnerin
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Rien.
Sinon une quiche lorraine.
Les petits lardons d’une épaisseur inférieure ou égale à trois millimètres égayent une garniture dorée à souhait et légèrement gonflée, comme par un désir. La pâte brisée nargue les vol-au-vent situés à trente et un centimètres et demi du bord gauche de l’assiette plate en grès dans laquelle elle repose, tandis qu’à son côté gît une salade alanguie. Monsieur la mélangera peut-être avec une cuillère et une fourchette en bois. Grand bien lui fasse. Du vin rouge, situé à un angle de (...)
12 décembre 2011, par Marianne Desroziers
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Dans le palais de jade où tu tisses tes, rêves, Ô mon spleen, je contemple, en fumant le houka, L’étrange accouplement qui rapproche deux Èves : La géante Chum-Chum, la naine Sélika.
Chum-Chum vient de la Chine et Sélika d’AfrIque, L’une, jaune, est pareille à quelque énorme coing, L’autre est couleur de nuit, Sapho microscopique, Et leur disparité s’oppose et se conjoint.
De la gloire pourtant leur entr’ouvrant la porte, Je peux les égaler à ces affreux dragons Qu’un amour de poète en son sillage (...)
19 décembre 2011, par Charles Müller,
Paul Reboux
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Ô horror ! horror ! horror !W. Shakespeare, Macbeth
Les Banques ont passé. Tout n’est que ruine et deuil, Poubelle qui déborde, et sur ce sombre écueil, Courent les rats, que des familles Chasseront pour nourrir leurs enfants, car parfois Y gît un vieux MacDo, qui comblera de joie Un chœur dansant de jeunes filles.
Tout est désert. Mais non ; seul près des murs noircis Un chômeur aux yeux gris, un jeune Grec, assis, Courbe sa tête, humilié ; Il a pour seul asile, il a pour seul appui La colère (...)
19 janvier 2012, par Magali D.
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Au milieu des flacons, des petits pots Danone, Et des meubles made in Crémone, Des marbres, des tableaux, des robes Christian Dior, Qui traînent massées en plis d’or.
Dans une chambre bleue, bijou du groupe Accor, Où un air pourrissant nous mord, Et où un bouquet grand comme un épicéa Exhale un parfum d’Ikea.
Un cadavre sans tête et vêtu d’Eminence, Répand sur l’oreiller qui danse, Un sang rouge et vivant comme un bout d’Olida, Un jambon, un pâté lambda.
Et semblable aux visions qu’enfante Monoprix, (...)
27 février 2012, par Jacques Cauda